Devant les élèves : Paroles d'enseignants
Mis à jour le 16.07.17
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Chaque enseignant se souviendra des lendemains du 7 janvier. Vivre ses émotions en les dépassant pour tenter de rester professionnel face aux élèves, permettre les débats, poser les cadres de la loi, faire vivre les singularités de chacun... ils racontent.
Catherine enseigne depuis plus de vingt ans
dans le 19e arrondissement de Paris. Une
urgence pour elle : « Le besoin d'aide. Le seul
enseignement de la laïcité ne suffira pas pour
apporter la réflexion et la prise de distance par rapport
à tous les discours qu'entendent nos élèves ».
Les enseignantes de l'école ont discuté avec leurs
élèves dont beaucoup sont de confession musulmane
« pour les accompagner dans leurs questionnements,
décrypter l'actualité et les commentaires
des réseaux sociaux ». Pour Catherine, « l'école a
un travail de longue haleine devant elle : la méconnaissance
des traditions des pays, des cultures qui
construisent le monde, des religions qui ont structuré
les civilisations n'apportent que clichés, idéologie
et discours tout faits ». Catherine a vu au fil du
temps une crispation du « religieux » : les mères
portent désormais le foulard, le refus du porc s'est
transformé en « pas de viande » et les enfants
s'épient les uns les autres en s'obligeant aux
règles communautaristes. Dans son école, près
d'un enfant sur dix de cycle III a pris le parti des
terroristes.
Eric, lui, est directeur à Charny dans la campagne
bourguignonne. Dans sa classe de cycle 3, ce sont
les faits qui ont traversé les débats, avec une question
commune à tous « est-ce que ça peut nous arriver
à nous ? » Les élèves, très affectés personnellement,
ont pu libérer leurs peurs. Eric envisage
maintenant de travailler les valeurs de la République pour les repositionner dans le quotidien et
faire le lien nécessaire.
Pour Brigitte, qui enseigne dans un quartier réputé
difficile en centre-ouest, « émotionnellement, c'était
très dur pour moi. Et que répondre aux enfants ? Les
niveaux de compréhension des uns et des autres
étaient très disparates et on est allé très vite sur le
terrain religieux. J'ai alors recadré sur les lois de la
République, expliqué les notions de deuil national et
de minute de silence. Et certains voulant s'y opposer,
je leur ai dit que la minute de silence en hommage
aux victimes était non négociable. Les jours suivants,
grâce au Petit Quotidien, on a organisé des débats
en groupes sur les dessinateurs de presse, la liberté
de la presse, le terrorisme islamiste... »
Institutionnel : Sur la plateforme éduscol
Comment parler d'un drame de l'actualité aux élèves ? Comment aborder les notions de liberté de conscience et d'expression ainsi que les principes fondateurs de la République à l'école primaire ? Le portail éduscol a mis à la disposition des équipes pédagogiques un ensemble de ressources qui peuvent permettre de nourrir des débats argumentés et mener un travail pédagogique dans la durée sur ces sujets. Des outils qui devraient s'étoffer dans les semaines qui viennent suite aux récentes annonces ministérielles. eduscol.education.fr |
L'ensemble du dossier :
Présentation du dossier
Devant les élèves : Paroles d'enseignants
Hélène Romano : « Faire un temps fondateur d'une nouvelle cohésion collective »
Note du CNESCO : « École : le défi de la mixité sociale et ethnique »
Agnès van Zanten : « La mixité se joue essentiellement au niveau local »
Histoire : La laïcité mais laquelle ?
Hicham Benaïssa : « La loi de 1905 est une loi de liberté »
Benoît Falaize : « Expérimenter les valeurs, sinon c'est du catéchisme »