CP : une mission à recentrer

Mis à jour le 23.11.22

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Formation et accompagnement des PE sont au cœur de la fonction de conseiller pédagogique.

Au cœur de la fonction de conseiller pédagogique, on trouve la formation et l’accompagnement des PE. L’accumulation des tâches administratives, les injonctions et la gestion des urgences remettent en cause des priorités indispensables au fonctionnement de
l’école.

Les conseillères et conseillers pédagogiques (CP) verront leur indemnité passer de 1 500 à 2 500 euros et toucheront enfin la prime REP en janvier 2023. C’est une juste revalorisation d’une fonction en mal de reconnaissance professionnelle et salariale. Créée en 1960 pour aider les IEN à former les enseignantes et enseignants débutants et remplaçants, la fonction de conseiller pédagogique a évolué depuis. « Le conseiller pédagogique est un enseignant du premier degré dont l'expertise pédagogique dans tous les domaines d'enseignement de l'école primaire est reconnue et validée par le certificat d'aptitude aux fonctions d'instituteur ou de professeur des écoles maître formateur (CAFIPEMF) », rappelle la circulaire de 2015. Ce texte a pour but de clarifier des missions qui « sont principalement d'ordre pédagogique ».

Trois champs d’action sont détaillés : « l'accompagnement pédagogique des maîtres et des équipes d'école, la formation initiale et continue des enseignants et la mise en œuvre de la politique éducative ». Il précise aussi que les tâches sont très différentes selon les territoires où les CP exercent. En effet, de nombreuses variables conditionnent l’orientation de leur travail au quotidien : nombre de PE en début de carrière, de classes dédoublées, circonscription rurale ou urbaine, mais aussi la conception de leur rôle par l’IEN. « Il peut prendre part aux tâches administratives liées au programme de travail pédagogique de la circonscription ou du département ». Ce qui ne devrait être qu’une possibilité selon cette circulaire, se traduit sur l’ensemble du territoire par une surcharge de sollicitations, voire d’injonctions bien éloignées de leurs missions premières : enquêtes, rapports, tableaux de bords..., un éparpillement des tâches qui rend parfois difficile la lecture de leur travail.

Accompagner pour guider

Difficile aussi de prioriser les réponses à apporter dans l’urgence face au malaise grandissant dans la profession enseignante. Elle est, en effet, confrontée à des problèmes éducatifs et d’enseignement croissants avec des difficultés d’ordre multiple, notamment liées à l’inclusion scolaire. Le temps de travail explose et les nouveaux plans densifiés en français et en maths (appelés aussi « constellations »), mis en place en 2020, aggravent cette situation. Ils proposent de rendre les PE « pleinement acteurs de leur formation en les associant à la définition des thématiques et des modalités de travail », en « permettant aux professeurs de prendre appui sur les résultats de la recherche pour trouver des réponses adaptées à leurs besoins et à ceux de leurs élèves ». Le CP est vu comme « un
accompagnateur, qui guide mais, surtout, écoute, propose, anime ». Si cette conception de la formation peut correspondre à leurs missions, son déploiement aurait dû s’accompagner de créations de postes en nombre et se heurte à des difficultés. Les dernières
orientations données à cette fonction dans les conclusions du Grenelle de l’Éducation inquiètent par leur volonté de les détourner vers une fonction d’encadrement et d’évaluation. Pour le SNUipp-FSU, leurs missions doivent se recentrer sur le cœur du métier : l’accompagnement et la formation des PE. Une meilleure reconnaissance de leur expertise professionnelle est nécessaire. Elle passe par une clarification et un allègement de leurs tâches, le respect du temps de travail sur 36 semaines et une formation de qualité pour ces personnels.

FsC 486 CPC ©MILLERAND-NAJA

Patrick Picard est formateur et  ancien directeur du Centre Alain-Savary de l’Institut français de l’éducation.

FsC 486 Patrick Picard ©MILLERAND-NAJA

Dans quel contexte se sont mises en place les "constellations" ? 

D’abord, rappelons que les plans de formation continue se sont dramatiquement réduits dans les dix dernières années. Ensuite, les
« constellations » peinent à limiter, à elles seules, les injonctions extrêmement normatives que la ligne « Blanquer » a fait peser sur l’école primaire. Avec une double conséquence : dans certains territoires, une rupture de confiance entre les formateurs et les écoles et un sentiment grandissant de malaise dans les circonscriptions, comme en atteste l’augmentation des postes de CPC vacants.

Une rupture de confiance qui met à mal la formation ?  

Je travaille avec de nombreux groupes de formateurs et je veux attester de leur fort attachement à la qualité de la formation continue
malgré les charges déraisonnables qui pèsent sur eux et les discours contradictoires portés par le ministère. Celui-ci affiche une ambition paradoxale de « partir du terrain » tout en étant très prescriptif sur les organisations pédagogiques et les méthodes à suivre. Les formateurs sont pris entre deux feux. Dans ce cadre, la « confiance » dans le regard de l’autre sur son travail ne peut être un préalable, mais la conséquence de la qualité de la formation.

Comment les formateurs peuvent-ils relever ce défi ? 

Très concrètement, les formateurs doivent jongler avec des manières de faire qui leur demandent beaucoup de compétences et d’expérience : définir les objets de travail avec les formés sans les laisser seuls pour les prendre en charge, trouver des modalités d’observation du réel des classes sans être intrusif, mettre des mots sur les difficultés du métier tout en en reconnaissant la complexité, faire discuter les dilemmes professionnels tout en proposant des outils, ce qui nécessite de solides compétences issues de
plusieurs champs de recherche. Lorsqu’ils réussissent à le faire, on constate un réel engagement des enseignants du fait de la prise en compte de l’ordinaire du métier dans sa complexité : apprendre à mettre des mots sur tout ce qu’on fait déjà, observer les différentes manières de faire et leurs bénéfices ou risques, faire des apports en réponse à des problèmes identifiés. Mais ces compétences expertes requièrent une formation exigeante et du temps pour des collectifs de formateurs.

FsC 486 CPC ©MILLERAND-NAJA

UNE PREMIÈRE VICTOIRE
Le ministère de l’EN suite aux interpellations du SNUipp-FSU vient enfin d’augmenter leur indemnité et de leur accorder la prime REP ou REP+. Rouages importants de l’école pour faciliter les relations avec les familles et les mairies, aider à monter les projets, accueillir des élèves allophones ou en situation de handicap, agréer les intervenant·es, etc, les CP souffrent, en effet, d’un manque de reconnaissance professionnelle et salariale. 27 points de bonification obtenus en 1991 et jamais revalorisés, une prime qui passe de 1000 à 1500 euros en 2022 : voilà ce que percevaient les CP rattachés aux circonscriptions. Elles et ils sont, en revanche, exclus du versement de l’indemnité de suivi et d’accompagnement des élèves (ISAE) ou de la prime d’équipement. Les CP doivent être indemnisés de leurs frais « dès lors qu’ils sont contraints de se déplacer hors des communes de leur résidence administrative et de leur résidence familiale » selon le décret du 3 juillet 2006 et la circulaire mise à jour du 21 juillet 2015. Pourtant, la faiblesse des enveloppes prises sur le budget académique empêche les défraiements à hauteur des besoins. Après cette première victoire. ISAE, prime d’équipement, remboursement de l’ensemble des frais de déplacements sont encore à obtenir

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