Para mi, Espana es....*

Mis à jour le 17.06.21

min de lecture

Dans l’Orne, les CM2 se familiarisent avec la langue espagnole grâce à eTwinning.

« Las puertas son del cielo las puertas de Madrid** », sont les mots qui résonnent dans l’atelier poésie d’Aikaterini Zinieri, enseignante de CM2 à l’école élémentaire de L’Aigle dans l’Orne (61). Plusieurs textes de Miguel Hernandez, célèbre poète espagnol, sont projetés au tableau. « Ce sont les poésies qui sont affichées dans le métro de Madrid ! » reconnaît un élève. S’en suivent des échanges fournis sur le repérage des mots connus et sur l’auteur. « Il est mort parce qu’il n’était pas d’accord avec les gens racistes, ceux qui pensaient comme Hitler » précise Mathéo. Les élèves, très actifs, font immédiatement des liens avec ce qu’ils ont appris en histoire. Puis, après avoir écouté l’enregistrement d’un correspondant espagnol déclamant une des poésies, les CM2 font de même. Face caméra, avec fierté, timidité ou assurance, ils se lancent dans la lecture de textes poétiques en espagnol. « L’objectif est de les mettre en confiance, de leur montrer qu’ils sont capables et peuvent réussir, préciseAikaterini. Je les filme pour partager avec nos correspondants avec lesquels nous travaillons toute l’année sur la plateforme eTwinning mais aussi pour donner à voir notre travail aux familles». 

reportage etwinning

Un duo gagnant

C’est lors d’une conférence pédagogique en 2015 que cette enseignante découvre eTwinning, une plateforme pour « échanger avec des établissements scolaires français et de travailler en français avec des classes de pays étranger » explique sa responsable en France, Elizabeth Sauser-Monnig. « Je cherchais à ouvrir ma classe aux autres, à d’autres pays, d’autres langues », précise la PE. En 2017, elle collabore en anglais avec des classes polonaise, anglaise et espagnole sur un projet consistant à présenter une personnalité de son pays. « Dès le début, avec Abel Carenas Velamazán, professeur de physique-chimie du collège Palomeras-Vallecas de Madrid, la mayonnaise a pris, rapporte Aikaterini. L’idée est venue de faire un projet à deux mais cette fois en espagnol. » Bien que les élèves n’aient pas le même âge, la collaboration est fructueuse. « Au début, les élèves ont été surpris de travailler avec des plus jeunes mais ensuite ils ont appris à travailler ensemble, note Abel. Ils échangent en visioconférence, se transmettent des objets mais surtout travaillent sur un projet commun ». Cette année, les classes ont réalisé un album sur les planètes, les collégiens travaillant sur les formules chimiques du tableau périodique et les CM2 identifiant les éléments présents sur les différentes planètes (hydrogène, hélium, carbone…). Un duo gagnant qui a reçu, il y a deux ans, le label eTwinning espagnol et français ainsi que le label européen pour le projet de l’an dernier. Devenue ambassadrice pour la plateforme, Aikaterini aide les collègues du département à se lancer. « Mon rôle consiste surtout à mettre en relation les enseignants car c’est souvent là que cela pêche » précise-t-elle. 

“Je cherchais à ouvrir ma classe aux autres, à d’autres pays, d’autres langues”

Bain de langage

Avec un autre groupe de CM2, Sarah Pageau, conseillère pédagogique départementale en langue vivante, mène un atelier théâtre. « L’important est d’offrir aux élèves un bain linguistique, explique-t-elle, j’ai choisi comme support l’album « Cinco monitos bricando en la cama***» qui a une structure en randonnée. Les images, les gestes et les intonations de la voix aident les élèves à comprendre l’histoire. La mise en scène poursuit ce travail et facilite la mémorisation des phrases et expressions. Le théâtre est un outil idéal pour apprendre en contexte comme lors de l’apprentissage de la langue maternelle ». Cette journée espagnole s’inscrit en complémentarité du travail réalisé tout au long de l’année en anglais. En effet, les élèves des écoles primaires de l’Orne doivent valider un certain niveau en anglais, l’espagnol est donc un apprentissage supplémentaire qu’offre Aikaterini à ses élèves. 

Du lien, encore et toujours

Créer du lien, favoriser les échanges, Aikaterina le fait aussi avec le collège Dolto de L’Aigle invitant les professeurs d’espagnol à participer à cette journée dédiée à l’Espagne. « J’ai tout de suite été séduit par cette idée " rapporte Gabriel Diez, professeur d’espagnol, originaire d’Argentine, qui a animé l’atelier lecture du matin et fait découvrir aux élèves l’Argentine l’après-midi. « Lire une histoire en espagnol sans la traduire, laisser le temps aux élèves d’interpréter, d’imaginer, les laisser se débrouiller avec cette langue qu’ils ne connaissent pas est très important pour les sensibiliser à la langue », précise-t-il. De plus, il constate que « les élèves sensibilisés à l’espagnol durant leur scolarité élémentaire ont déjà du vocabulaire et une aisance. Avant de connaître ce projet, j’étais surpris de voir arriver des élèves en 6e avec des acquis en espagnol. Ce projet est vraiment génial ! ». Le 15 juin prochain, le projet Espagne sera clôturé par la venue de l’association « 24 août 1944 » qui viendra présenter en classe le parcours d’un Républicain espagnol durant la guerre de 39-45. Un beau programme en perspective.

*Pour moi l’Espagne c’est…
**Extrait de la poésie de Miguel Hernandez
« Las puertas de Madrid », les portes de Madrid
***Cinq petits singes sautant sur le lit

Anne-marie VOISE

Anne-Marie Voise est maîtresse de conférences à l’université Paris Créteil, spécialiste des langues

Où en est l’enseignement des langues ? 

Depuis 1989, les enseignants de cycle 3 se sont emparés de cet enseignement. Depuis 2016, il y a une montée en charge de l’enseignement des langues avec un caractère obligatoire dès le CP. Dans les faits, bien qu’affiché dans les programmations, cet enseignement passe parfois à la trappe ou est réduit à la portion congrue avec les couleurs, les parties du corps, Noël…
S’il y a une volonté affichée de développer l’enseignement des langues à l’école primaire avec le rapport « Osons les langues » de l’inspection générale ou celui du CNESCO, sur le terrain les enseignants sont frileux et peu préparés. 

Qu’apportent les projets de type eTwinning ?

Il faudrait exposer les enfants à la langue quotidiennement sur des plages de 20 à 25 minutes plutôt que deux fois 45 minutes par semaine et articuler les langues aux autres domaines disciplinaires autour de projets pour donner du sens à cet apprentissage. Les jeunes enfants sont capables de reproduire des modèles phonologiques quasi à l’identique, il est important de les éveiller à la diversité linguistique et culturelle pour semer en eux le plaisir de découvrir. Les plateformes d’échanges virtuelles, telle que eTwinning, permettent de comprendre la langue de l’autre en provoquant des échanges entre les élèves et d’effectuer des apprentissages autour de projets communs.

Écrire à la rédaction

Merci de renseigner/corriger les éléments suivants :

  • votre prénom n'a pas été saisi correctement
  • votre nom n'a pas été saisi correctement
  • votre adresse email n'a pas été saisie correctement
  • le sujet n'a pas été saisi correctement
  • votre message n'a pas été saisi correctement

Merci de votre message, nous reviendrons vers vous dès que possible