ASE et école : accord mineur

Mis à jour le 17.06.20

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Entre l'Aide Sociale à l'Enfance et l'école, il y a les enfants...

Les enfants sous la protection de l’Aide sociale à l’enfance placés en famille d’accueil, en collectivité ou maintenus dans leur foyer, rejoignent tous les jours les bancs de l’école. Pour le PE qui n’a pas à connaître le détail de leur parcours de vie, le lien avec les éducateurs ne peut être que bénéfique.

Les enfants placés sous la protection de l’Aide sociale à l’enfance (ASE) sont-ils des élèves comme les autres ? Ils le sont au nom du principe d’égalité, mais il faut aussi reconnaître qu’ils ont des destins particuliers d’enfants. Même si l’enseignante ou l’enseignant de leur classe n’a pas connaissance du dossier, il ou elle sait que bien souvent violences, précarité, carences affectives et instabilité ont été leur quotidien.
S’il y a la possibilité d’assurer une scolarisation dans les lieux d’accueil d’urgence quand elle n’est pas possible en milieu ordinaire, c’est généralement dans les écoles de quartier que ces enfants sont scolarisés. Si rien de précis n’est prescrit par l’institution pour les accueillir, les PE leur accordent bien souvent une attention particulière. Philippe Noller, directeur d’une école à Thionville (57) qui accueille 12 enfants de deux MECS (Maison d’enfant à caractère social), a mis en place « des protocoles d’accueil, avec des aménagements d’emploi du temps liés à la situation individuelle de chaque élève ».

Lever les obstacles

Pour le maître, un élève en difficulté, qui relève de l’ASE ou pas, reste un élève en difficulté. Pour autant, établir le lien entre l’école et la structure d’accueil peut être bénéfique. À Thionville, des réunions sont organisées tous les mois entre l’école (équipe enseignante) et le centre (le directeur et les éducateurs) pour parler des élèves, revoir les aménagements d’emploi du temps, gérer des conflits. Comme pour tous les élèves en grande difficulté, des équipes éducatives rassemblent deux fois par an, les PE, le directeur du centre et les personnels spécialisés. Une collaboration indispensable mais qui reste cloisonnée dans bien des endroits.

ASE et école

Cette absence de lien ne facilite pas le travail des enseignants. « Comme nous n’avons aucune information personnelle sur les élèves, secret professionnel oblige, il est parfois difficile de comprendre ce qui fait obstacle », témoigne Hélène Saucourt, enseignante en Ulis dans une école en Rep+ à Woippy (57) accueillant trois enfants d’une MECS voisine. Pour compenser, l’enseignante favorise les relations duelles. « Pour ces enfants, l’échec est souvent insurmontable. Il faut toujours être très attentif à ce que l’on dit. Éviter les « c’est l’heure des mamans » ou « vous demanderez à vos parents » », conseille-t-elle. De son coté, Justine Bolli, monitrice-éducatrice dans un centre à Strasbourg explique que « quand il y a un eu un problème dans la journée, on en parle à la sortie des classes. Chaque trimestre, nous rédigeons un rapport sur les deux ou trois enfants dont nous sommes les référents et la scolarité en fait partie. » Mais regrette-t-elle, « le soir avec des groupes importants, c’est difficile de trouver du temps pour faire les devoirs avec chacun ». Une réalité que ne peuvent ignorer les PE.

Tous ensemble

Reste que pour offrir le meilleur développement possible à ces enfants, chacun devrait pouvoir jouer sa partition à l’unisson. C’est ce dont témoigne Karim Adjissi, chef de service éducatif dans un établissement pour enfants en Alsace : « Les partenariats éducatifs, culturels, sportifs sont nombreux. À côté du RASED ou du CMPP, l’étayage interne est important avec des psychologues et des orthophonistes. Des aides souvent déclenchées à la demande des enseignants. On essaie de trouver des solutions avec l’école pour permettre aux enfants de mieux entrer dans les apprentissages ».

Khaled Benlafkih est éducateur spécialisé au Conseil départemental de la Seine-Saint-Denis et référent ASE 93 pour une vingtaine d’enfants.

Khaled Benlafkih

Comment améliorer les relations de l’ASE et de l’école ?

Dans beaucoup de communes, les partenariats avec les établissements sont mis en place depuis de nombreuses années. Des liens se tissent avec l’enseignant, la direction de l’école, le centre et les référents. Ces inférences au niveau des territoires riches de nombreux échanges apportent des réponses intéressantes. La 1re phase, après un signalement souvent opéré par l’école, est administrative. Dans un second temps, on formalise un « Projet pour l’enfant », un outil dont le garant est le référent ASE en lien avec les titulaires de l’autorité parentale et l’enfant et nourri par l’école, le champ psychologique, le lieu d’accueil pour arrêter ensemble des objectifs. Pour l’ASE, l’important est d’avoir un projet partagé. L’enfant doit se rendre compte que les liens se font autour de lui. Mais le turn-over important des équipes complique le suivi scolaire et les apprentissages.

À quoi les enseignants doivent-ils être attentifs ?

Les travailleurs sociaux sont soumis au secret professionnel et cela crée souvent de la frustration chez les enseignants. Ces enfants n’arrivent pas là par hasard et quand un enfant est en difficulté, il faut comprendre pourquoi il ne répond pas aux consignes, pourquoi il est insolent ou violent. C’est un processus long car chaque situation familiale est particulière. L’ASE n’a pas de baguette magique. L’enseignant a un rôle clé car il repère très vite les difficultés scolaires, mais il n’a pas forcément les ressources et les outils pour s’occuper de ces enfants. L’aménagement des emplois du temps, c’est aussi du temps scolaire en moins. Autre erreur, l’orientation précoce. Quand l’élève est en difficulté, quand il y a du retard en primaire, l’institution signale, évalue, oriente trop rapidement vers le spécialisé ou l’adaptation. Dans certaines communes, via les réseaux associatifs, une aide aux devoirs est mise en place en lien avec les enseignants. Ce sont des ressources bénéfiques. L’important c’est que l’enfant sente qu’on s’intéresse à lui et qu’on a des attentes. Il faut prendre du temps, le valoriser aussi… mais avec 30 élèves en classe, c’est compliqué car pour ces enfants, il n’y a pas une réponse unique.

ASE une politique publique

En France, fin 2018, 355 000 enfants étaient placés par les juges à l’ASE, sous la responsabilité des départements. La gestion décentralisée de ce service public engendre de grandes disparités selon les territoires ainsi que des dérives. Le budget annuel s’élève à 8 milliards d’euros.

Le signalement

À l’origine du placement d’un enfant, il y a souvent des violences physiques, sexuelles ou psychologiques subies dans la famille. Un voisin ou un enseignant inquiet fait une information préoccupante. Une enquête est alors lancée et un juge décide de placer l’enfant pour le protéger d’un environnement familial qui ne joue plus son rôle de protection et d’épanouissement. Il arrive aussi parfois que des parents soient dépassés par des situations de grande précarité.

Prévenir

Deux lois, en 2007 puis en 2016, ont mis au premier plan la prévention, avant le placement : accompagner les familles le plus en amont possible dans leurs difficultés quotidiennes et renforcer l’accompagnement éducatif en milieu ouvert. Quelque 185 000 enfants et jeunes majeurs, soit près de 53% des mineurs confiés à l’ASE, sont cependant placés dans des familles d’accueil ou dans des foyers, pouponnières, maisons ou villages d’enfants…

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