Rapport Villani : quels moyens pour avancer ?

Mis à jour le 13.02.18

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« 21 mesures pour l’enseignement des mathématiques » : le rapport Villani-Torossian remis le 12 février au ministre enfonce un certain nombre de portes déjà ouvertes et inquiète par endroits. Et si on permettait enfin aux enseignants de faire sereinement leur travail ?

Le rapport sur l’enseignement des mathématiques piloté par le député Cédric Villani et l’inspecteur général Charles Torossian vient d’être remis au ministre. L’état des lieux qu’il dresse sur les difficultés du système scolaire français à faire réussir les élèves dans le domaine des mathématiques est largement partagé et corroboré par les évaluations internationales. Partagée également l’analyse de ces difficultés qui croise des données sociales, culturelles, didactiques et pédagogiques : mauvaise image de la discipline, appréhendée avant tout comme un instrument de sélections scolaire, profil principalement littéraire des enseignants et des enseignantes dans le premier degré, lacunes dans la formation initiale et continue, revirements incessants des préconisations officielles…

Des préconisations inquiétantes

Que faire pour sortir de l’ornière ? Le rapport préconise 21 mesures et 32 recommandations dans des champs très variés qui vont de la création de clubs mathématiques dans le périscolaire à une réforme de la formation des enseignants laissant place à un parcours disciplinaire dès BAC +1, notamment en mathématiques. 

Peu de surprises à la lecture des mesures relatives au premier degré. Les références aux trois phases d’apprentissage (manipulation, verbalisation, abstraction), à l’enseignement explicite, à l’importance de la numération et du calcul mental, au travail sur le sens des opérations figurent déjà dans les programmes de 2016, rédigés, il est vrai, avec le concours de didacticiens des mathématiques qui faisaient cruellement défaut à la mission Villani.
Plus inquiétantes sont les préconisations du rapport portant sur les méthodes et les manuels. Bien que rappelant la nécessaire liberté pédagogique des enseignants, la mission met en exergue les exemples « qui marchent » à l’étranger, se propose de faire le tri entre bons et mauvais manuels, de mettre à disposition des enseignants un matériel standardisé, des protocoles d’évaluations à utiliser trois fois par an. Sur une question complexe et multifactorielle, l’expérience montre pourtant les écueils des solutions clés en main : Singapour n’est pas Clichy-sous-Bois ni Rodez et le protocole Savoir lire écrire compter calculer (SLECC) cher à l’un des membres de la mission a échoué à faire la preuve de son efficacité.

Quel accompagnement, quelle formation pour les enseignants ?

Attendu sur la question de la formation initiale et continue, le rapport pointe le problème sans y apporter de réponse concrète, hormis la création d’un poste de conseiller pédagogique spécialisé en maths par circonscription. Impossible sans moyens dédiés de progresser sur ce volet comme sur celui des liens entre école et recherche eux aussi appelés de ses vœux par la mission Villani. Pour le SNUipp-FSU, c’est pourtant en travaillant au plus près de la réalité et des besoins du terrain qu’on pourra faire progresser la réussite de tous les élèves, en mathématiques comme ailleurs. Pour l’heure, enseignantes et enseignants n’ont pas besoin de nouveaux changements, ils viennent à peine de s’approprier les nouveaux programmes et aspirent à travailler dans la cohérence et la continuité en bénéficiant de conditions de travail améliorées.