Pacte enseignant : les bonnes raisons de le refuser

Mis à jour le 22.05.23

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Au moment où le pacte enseignant se met en place, la FSU-SNUipp donne les bonnes raisons de ne pas entrer dans ce dispositif.

Ce n’est pas une augmentation

Être payé·e pour des missions supplémentaires, comme les 18h de soutien en 6ème, ce n’est pas une augmentation : ce sont des heures supplémentaires. Alors que les 108H sont largement dépassées par toutes et tous, ce n’est pas “travailler plus pour gagner plus” dont la profession a besoin mais d’être rémunéré·es pour les tâches déjà effectuées.

Il fait exploser un temps de travail déjà trop conséquent

Avec 43H00 par semaine en moyenne, les enseignantes et enseignants travaillent déjà beaucoup. Demander à ces dernier·es de travailler encore plus représente un risque pour la santé des personnels dont l’employeur est pourtant le garant. Quand on sait que la moitié des professeur·es se déclare en situation d’épuisement professionnel élevé selon les chiffres du Ministère, exiger de travailler plus pour que les personnels puissent répondre à leurs besoins financiers réels est une provocation du Ministère.

Il augmente la charge des directrices et directeurs et les place en position d’encadrement

Le pacte serait placé sous le contrôle des directrices et directeurs d'école. Cela va nécessairement entraîner une surcharge de travail pour identifier les besoins et « distribuer » les rémunérations afférentes aux collègues volontaires. Cela risque également de les isoler au sein d’une équipe qui pourrait ne plus être un collectif mais une somme d’individualités.

 Il renforce les inégalités Femmes/Hommes

Les études sont unanimes : à l’heure actuelle les tâches domestiques, liées à l’éducation des enfants ou à la gestion de la vie quotidienne reposent encore très majoritairement sur les femmes. Dans une profession féminisée à 80%, cela impacte les carrières et les salaires.
Le bilan social du Ministère le dit clairement : les primes liées à des missions (21% de primes en moins pour les femmes) ou les heures supplémentaires (41% d’exercice supplémentaire pour les hommes) ont un impact salarial fort au détriment des femmes. Demander d’autres missions renforce de fait les inégalités de genre.

Il ne répond pas à la difficulté scolaire, contrairement à ce qu’il prétend

Prétendre répondre à la difficulté, après 8 ans d’école primaire, par 1h de soutien au collège est une aberration pédagogique. Y répondre ne peut se concevoir que d’un point de vue global, et non en isolant le français et les mathématiques, les dits « fondamentaux », des autres apprentissages en arrivant au collège. L’intervention des PE en 6ème est conçue par le ministère comme un moment de « traitement » de difficultés, ciblé sur des compétences fragmentées correspondant aux items des évaluations nationales standardisées.
La difficulté scolaire doit être traitée au sein de l’école par des personnels formé·es. Et les enseignantes et enseignants devraient avoir les moyens, par du temps de préparation libéré, par la formation, par la baisse des effectifs dans les classes, d’y apporter des solutions au quotidien.

Il nie l’aspect collectif des apprentissages et de leur construction

Le pacte porte conception du métier qui nie toute dimension collective. Du côté des apprentissages des élèves, il renvoie à des remédiations individuelles, extérieures à la classe et à ses dynamiques collectives d’apprentissage. Du côté du travail des enseignant.es, il va entraver le fonctionnement collectif des équipes enseignantes. Avec des heures au collège (le mercredi matin, le soir), ou des heures de soutien hors la classe qui s’ajoutent aux APC, soit les concertations deviendront encore plus difficiles à organiser, soit elles se dérouleront sans les PE qui auront signé le « pacte »… L’expérience du PDMQDC avait pourtant montré que le travail collectif d’analyse et d’élaboration entre pairs permet de mieux comprendre les stratégies et difficultés des élèves, et renforce la professionnalité enseignante.

Il institutionnalise les inégalités territoriales

La base du pacte est le volontariat. En fonction des PE qui s’engageraient dans un soutien supplémentaire aux élèves, en plus des APC, en élémentaire, les élèves auront des heures d’enseignement en plus ou pas… Plutôt que d’avoir une réponse équitable sur l’ensemble du territoire, le Ministère renforce une autonomie qui renforce les inégalités et se fait au détriment des élèves.

Impasse pédagogique et «travailler plus pour gagner plus» inacceptable, la FSU-SNUipp appelle les personnels à ne pas entrer dans le pacte. Conscient de l’urgence d’une revalorisation salariale, il continuera à porter l’exigence d’une revalorisation immédiate et sans contrepartie de 300 euros nets mensuels via le point d’indice. Il continuera à mobiliser les personnels en ce sens et proposera des initiatives dès la rentrée.