Un statut pour les directeurs ? Mauvaise idée.

Mis à jour le 16.11.18

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Suite à l'annonce de la mise en place d'un statut pour les directeurs et les directrices d'école, le SNUipp-FSU s'adresse au ministre pour ouvrir les discussions prévues dans l'agenda social sur le sujet. Car s'il y a urgence à améliorer la situation de la direction de l'école personne ne pourra croire que l'adjonction d'un statut hiérarchique peut constituer l'alpha et l'oméga des réponses à apporter.

L’annonce était dans l’air, elle est tombée le 15 novembre sur le site de Matignon. « Rapprocher les directeurs des chefs d’établissement du 2nd degré : c’est la volonté affichée par le ministre de l’Éducation nationale. Un changement de statut qui permettra de mieux articuler les liens entre école et collège. »
Mauvaise idée pour le SNUipp-FSU, qui s’est immédiatement adressé au locataire de la rue de Grenelle. Car « s’il y a urgence à améliorer le fonctionnement pédagogique, éducatif et administratif de l’école, ainsi que la reconnaissance et les responsabilités dans l’exercice de la fonction de direction d’école, cela ne peut passer ni par la création d’un statut hiérarchique, ni par la réorganisation territoriale des structures d’enseignement », prévient le courrier.
Un tel statut ne ferait que renforcer la position administrative des directeurs, les éloignerait des adjoints, sans répondre à leurs difficultés. Le syndicat lui demande donc de prendre le temps de la discussion.

La lettre au ministre

Monsieur le Ministre de l’éducation nationale,

Vous venez d’annoncer une nouvelle organisation administrative de l’école avec à la clé un nouveau statut des directeurs et directrices. S’il y a urgence à améliorer le fonctionnement pédagogique, éducatif et administratif de l’école ainsi que la reconnaissance et l’exercice de la fonction de direction d’école, cela ne peut passer ni par la création d’un statut hiérarchique à l’instar des chefs d’établissements du second degré ni par la réorganisation territoriale des structures.

Nous venons d’organiser les États généraux de la direction d’école. Réunis dans plus de 60 départements ainsi qu’au niveau national, ils nous ont permis de prendre les avis et analyses de près de 2500 collègues, de partager des constats et de dégager des pistes d’amélioration. Ils ont confirmé que les responsabilités et les tâches liées à la direction d’école n’ont cessé de s’alourdir ces dernières années. Un alourdissement lié aux demandes de l’institution, aux évolutions et à la complexité du métier d’enseignant, mais également aux sollicitations multiples, notamment celles des collectivités territoriales. Cet empilement de tâches réduit la part du travail de direction consacrée à l’animation pédagogique et à la coordination de l’équipe. Alors que dans le même temps, les derniers emplois aidés dévolus à l’aide administrative à la direction et au fonctionnement de l’école ont été supprimés. Par ailleurs, les directeurs et directrices demandent que l’institution prenne davantage en compte leurs spécificités et leurs responsabilités et ainsi reconnaisse l’identité professionnelle du directeur d’école, comme une personne plurielle. 

Votre réponse à ces problématiques par la création d’un statut de direction n’est pas appropriée. Un tel statut ne ferait que renforcer la position administrative des directrices et directeurs, les éloignerait des adjointes et adjoints et instaurerait des relations managériales au sein des équipes. Le tout sans répondre aux difficultés posées.

Pour améliorer la gestion des écoles, les directrices et directeurs ont avant tout besoin de temps, de personnels supplémentaires pour aider au fonctionnement de l’école et d’une formation autour de la dynamique collective ainsi que l’élaboration et l’impulsion de projets communs. Tout cela est à l’opposé du nouveau maillon hiérarchique que vous préconisez. Or, depuis toujours, les écoles fonctionnent très bien sans autorité hiérarchique en leur sein. L’ensemble des enseignants des écoles, directrices et directeurs comme adjointes et adjoints, nous disent leur attachement au collectif de travail, avec le conseil des maîtres, pour répondre aux besoins des élèves et favoriser leurs réussites. L’intérêt des élèves, le bon fonctionnement de l’école, la reconnaissance des personnels engagés pour une meilleure réussite de tous exigent donc de toutes autres mesures concrètes répondant réellement aux préoccupations des personnels et de l’école.
Pour autant, la reconnaissance d’un rôle spécifique pour les missions de direction d’école est indispensable mais ne peut se traduire par un statut hiérarchique qui ne soulagerait pas le directeur ou la directrice dans ses tâches et l’isolerait au sein des équipes.

Avant toute décision hâtive, qui consisterait à apporter une réponse toute faite à un constat complexe, le SNUipp-FSU vous demande solennellement de prendre le temps de la discussion telle que prévue dans l’agenda social, et ainsi de tenir compte de la parole des enseignants sur la réalité du rôle, des missions et du quotidien des directeurs et directrices.

Veuillez croire, monsieur le Ministre, en notre profond attachement au service public d’éducation. 

Paris, le 16 novembre 2018.